Nous avons vu précédemment les éléments essentiels de l'arrêté municipal. Le sujet était illustré de l'arrêté d'autorisation d'occupation du domaine public du Maire de Locon pour une manifestation culturelle à la demande du club photo.
Sur quels fondements, le Maire aurait-il pu s'opposer à cet événement ?
L'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) dispose :
"La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. (...)".
Il s'en suit dans cet article des précisions sur ce que l'on peut entendre à propos de ces termes. Ainsi, le Maire peut, par arrêté, refuser une manifestation sur la base de cet article ; sans compter que l'occupation du domaine public doit effectivement, d'abord, faire l'objet d'une demande préalable.
Mais s'agit-il des seuls fondements sur lesquels le Maire puisse s'appuyer pour refuser une activité ?
Si je pose la question, vous vous doutez bien que "non" ; et c'est l'arrêt commune de Morsang-sur-Orge du Conseil d’État du 27 octobre 1995 qui l'affirme.
Cet arrêt est très connu des étudiants en droit et les amuse car les faits sont plutôt singuliers :
Dans une discothèque de l'Essonne, le patron d'une boîte de nuit organise un lancer de nain. Le nain est un cascadeur professionnel et les conditions pour assurer sa sécurité sont réunies. La compétition consiste à le lancer le plus loin possible.
Le maire de la commune de Morsang-sur-Orge prend un arrêté pour interdire l'événement. Pour cela, il se fonde sur l'ancien article L. 131-2 du code des communes, (dont l'article L. 2212-2 du CGCT en est aujourd'hui l'équivalent), non pas pour des questions de garantie de sécurité du public ou pour prévenir d'éventuels troubles à l'ordre public, mais en estimant qu'il s'agit d'une représentation portant atteinte au respect de la dignité de la personne humaine.
Le gérant de la discothèque et le nain ont déposé une requête devant le Tribunal administratif de Versailles qui a annulé l'arrêté, considérant qu'aucune circonstance particulière ne permettait d'interdire la manifestation.
Saisi en appel par le maire, le Conseil d’État juge que le respect de la dignité de la personne humaine est une composante de l'ordre public. Le maire de Morsang-sur-Orge pouvait donc se fonder sur ce critère pour interdire le lancer de nain.
Il en résulte qu'un maire ou toute autorité investie du pouvoir de police municipale peut interdire une attraction portant atteinte au respect de la dignité de la personne humaine en l'absence de circonstances locales particulières.
Lien vers l'arrêt commune de Morsang-sur-Orge : https://www.conseil-etat.fr/fr/arianeweb/CE/decision/1995-10-27/136727
Morsang-sur-Orge - Hôtel de ville (source wikipédia) |
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